Interview de Electric Rescue : Un parcours plus rave par choix

Image d'avatar de Fabien KerneisFabien Kerneis - Le 25 septembre 2015

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“un parcours parallèle beaucoup plus rave et underground par choix”

Beware s’est entretenu avec Electric Rescue – pilier de la techno française – à l’occasion de sa venue à Montréal à la soirée OCTOV du 26 septembre . Il jouera en live pendant 2h et sera accompagné par l’ami Rafa Pineda de 8day et Deep Spelle.

Avec près de 25 ans de carrière derrière lui, l’artiste a participé et assisté à l’essor de la techno de ces dernières années, en restant dans l’ombre, l’underground comme on l’appelle. On s’est intéressé à son analyse du mouvement techno avant de parler de sa musique. Il discute de ses longues années de carrière, apporte son point de vue – ô combien éclairé – sur la musique et le mouvement techno et adresse un petit message aux danseurs qui seront là samedi.

On commence par une track avant de vous laisser découvrir ce qu’a à dire l’artiste.

Ta carrière a commencé il y a plus de 20 ans, en même temps que Laurent Garnier d’ailleurs. Parle nous un peu de cette époque, tes meilleurs souvenirs mais aussi tes galères ?

« Oulah çà fait même 25 ans malheureusement d’un côté et je suis bien chanceux d’avoir connu tout ça. Je n’ai pas été aux côtés de Laurent Garnier mais c’est quelqu’un avec qui je m’entends bien qui m’a beaucoup poussé et on s’apprécie beaucoup. C’est vrai que j’ai eu la chance de faire un disque sur son label Fcommunication, mais j’ai eu plutôt un parcours parallèle beaucoup plus rave et underground par choix. Mais bref, on fait toujours bien attention à l’un et à l’autre et je l’en remercie tous les jours d’ailleurs vu l’agenda de ministre qu’il a.

Raconter 25 ans de meilleurs souvenirs pourrait nécessiter l’écriture d’un bouquin car j’ai toujours été très chanceux de pouvoir faire à chaque instant ce que je voulais dans ce milieu et vivre de ma passion. Mais on peut dire que les points culminants de ma carrière auront été les raves à Mozinor (lieu mythique à paris), 20 ans de vie commune avec le Rex, le fait de devenir résident du plus beau des festivals niveau esprit rave, Astropolis, de jouer dans le désert à côté de la mère morte, de jouer avec un public survolté au Japon, de découvrir la Chine et plein d’autres pays. Que ce soit sur les dates ou en organisation, il y a toujours une part de galère, c’est normal dans un travail, mais tout cela s’oublie vite quand on a la chance de passer des moments magiques à proposer de la musique sur de beaux événements comme çà. Je ne peux rentrer dans le détail car on va en marquer des pages et des pages d’anecdotes.

Qu’est-ce qui a changé depuis ?

Tout à changé, les moyens de communications, les moyens techniques, les sonorités bien que tout çà est cyclique et qu’en ce moment on est à fond années 90 dans les sonorités. Par contre, il y a une chose qui reste intact, c’est l’esprit techno, cet esprit libre musicalement, l’envie de fouiner dans les sonorités, l’envie de se réunir et de partager en grand nombre, l’esprit rave demeure et perdure, et je pense que ça n’est pas près de s’arrêter.

Penses-tu que la nouvelle génération peut comprendre et respecter ça ou bien au contraire, créer une nouvelle approche face à la musique techno ?

Les deux mon général ! Ils peuvent la comprendre et la digérer plus vite que nous tout en y apportant de la fraîcheur et de la personnalité façon 2015. Heureusement d’ailleurs que chaque nouvelle génération apporte son lot de fraîcheur et d’innovation c’est ce qui fait durer, même si les fondamentaux eux ne bougent pas. Le respect d’avant se retrouve notamment aujourd’hui dans la manière dont les tout jeunes jouent la musique de Robert Hood par exemple, ils ont tout compris à quoi elle sert la musique de Robert Hood. Ils arrivent à s’en imprégner et proposer de nouvelles ramifications extrêmement intéressantes, j’en joue beaucoup. Je parle de Robert Hood, mais il y a pas mal d’anciens artistes qui ressurgissent en ce moment combinés à du très jeune et le mélange est parfait.

 

Quelles sont les valeurs qui te tiennent à cœur dans la philosophie et la communauté Techno ?

Respect, Culture de la différence et des mélanges, Partage, Expérimentation et Recherche, l’Engagement, le Sourire, et il y en a d’autres mais avec ces ingrédients là on est bien déjà !

Vu ton expérience et ta connaissance du domaine, je suis vraiment intéressé par ton analyse du mouvement techno et sa progression. Penses-tu qu’il faut absolument être « underground » pour être un dj techno reconnu aujourd’hui ?

Il faut surtout jouer ce que l’on veut, ne pas trop se donner de règles. A force de donner trop de codes et trop d’images les gens finissent par faire la musique avec leur yeux plutôt qu’avec leurs oreilles. Être techno, c’est toutes les valeurs citées précédemment mais c’est aussi ne pas avoir peur de mélanger, aujourd’hui on voit une scène techno très underground qui est certes intéressante mais il y a une bonne partie de cette scène qui est fermée, l’intégrité a laissé place à l’intégrisme. Nous sommes aujourd’hui malheureusement dans un monde qui tend vers l’intégrisme, le clivage des genres, refuser l’autre parce qu’il est un peu différent que çà soit en religion, en pas mal de domaine et même en musique malheureusement. C’est un des point qu’il faut combattre car la techno n’est que mélange et si elle ne se mélange plus à d’autres influences elle finira par imploser. Ce qui fait que cette musique a presque 30 ans c’est qu’elle a su fusionner à pas mal d’autres styles et aujourd’hui les différentes scènes se boudent un peu ce n’est pas progresser. On peut avoir des goûts et les exprimer sans dénigrer la différence de ceux des autres. L’artiste qui durera celui sera qui étonnera.

On a beaucoup entendu dire par le passé que l’électronique à Paris et en France c’était pas la joie et beaucoup préféraient Berlin. T’en penses quoi ?

Ah ah ah ah ! Aujourd’hui, à Paris il se passe plus de chose qu’à Berlin, Paris est devenu la ville techno la plus regardée dans le monde. Pour une fois que nous avons cette chance, je n’ai pas envie de la laisser passer. Ce que tu dis était le cas avant, mais aujourd’hui Paris est en ébullition il y a plus de 15 clubs qui jouent de la techno tous les week-end de 500 à 2500 personnes plus des raves de 1000 à 18000 personnes (Weather notamment).
Non Paris aujourd’hui est bien bien active, ça se calmera forcément à un moment donné, mais pour le moment c’est le gros bordel à Paris avec Concrete, Tunnel, 1936, Drom, Marvellous Island, Weather, new tracks et plein plein d’autres événements qui font sortir pas loin de 50000 jeunes par week end pour une musique pointue, pas du ghetta ou machin merde, donc je dirais plutôt que c’est la grande joie.

Penses-tu que cette démocratisation massive pourrait nuire à la musique techno ?

Bah logiquement la scène se scindera en deux il y aura une face populaire et une face plus underground, c’est le cheminement naturel de toute musique il ne faut pas trop s’inquiéter de çà si on est un fervant défenseur de l’underground et de la musique libre, dont je fais parti. Il suffit de suivre le chemin qu’on veut et l’éthique musical que l’on veut.

Qu’est ce qui influence ton live ? Tu suis plutôt le public ou ton inspiration ? Un mélange des deux ?

Oui c’est un mélange des deux, je conçois mon live en me laissant la liberté d’un Dj set et je peux m’adapter tout en gardant ma personnalité à l’ambiance du moment. Je prépare beaucoup de choses en amont pour avoir le choix dans les ambiances et les énergies à diffuser. Je mélange synthés analogiques, modulaires et solutions digitales.

Parle nous de Picture of Cephei, sorti en Juin. As-tu une approche particulière à chaque fois ?

Alors entre temps il est sorti d’autres choses que Picture of Cephei , sur le label Intacto notamment j’ai eu deux sorties cet été. En fait je ne raisonne pas du tout en terme de EP je fais des tracks les uns après les autres et au bout de quelques mois quand je sens que j’ai ce qu’il faut pour démarcher et concevoir des EP, je fais des regroupements de morceaux et j’envoie aux labels. Je ne me mets pas d’objectifs artistique et de temps, je veux rester libre pour fouiller, explorer et laisser dérouler et il sort ce qu’il sort, on fait le point après et on envoie, voila c’est sans limite sans contraintes et compromis.

En me documentant j’ai lu que sur l’album Sonic Architecture, tu t’étais inspiré de groupes de rock alternatif comme The Stone Roses ou Ride – chose assez rare dans la techno pour le souligner.

Ces groupes là m’ont inspiré à un moment donnés c’est vrai, mais ces dernières années je me sens plus influencé par des groupes comme Radiohead, Apparat, Modeselektor, et bien d’autres. Ils m’influencent surtout pour la partie voyage des albums, le côtés mélancolique, expérimentation, les touches Rock, Pop ou Electronica réadapté à ma sauce. Oui ils m’influencent beaucoup, surtout quand je rentre dans cet état de mélancolie qui me donne envie d’écrire puis de fermer les yeux et écouter.

Tu as déjà joué sur notre île ?

Oui c’est mon troisième passage sur Montréal et j’adore venir ici pour plein de raisons, la ville, des amis, les événements proposés, j’aime vraiment cette ville au point d’avoir emmené avec moi cette fois ci ma femme et mon fils pour leur faire découvrir l’ambiance d’ici que j’adore. Ils seront d’ailleurs avec moi en after de la soirée OCTOV au Picnik Electronik, ça va être cool !

As-tu un mot à dire à Montréal avant le show du 26 septembre ?

Les mots ont été dit on va laisser place aux notes maintenant non ? Si je dis tout maintenant j’aurais moins de choses à dire avec vous en direct sur place, et çà serait dommage, je viens là pour échanger et partager, vivement samedi !!!

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