ISAAC DELUSION / Interview en exclu pour leur premier album !

Image d'avatar de Alice ColasAlice Colas - Le 30 mai 2014

De la vraie pluie, celle qui fait des torrents entre les pavés, qui s’écrase sur les toiles suspendues des terrasses. “Putain, y’a plus de saisons”. C’est la saison du printemps triste, qui te fait sortir de chez toi en culotte courte et bonnet. Nous, chez Beware, on a peur de rien, on a enfilé les bottes et le ciré on a foulé les quais de Valmy le coeur léger, l’appareil photo et le moleskine en main pour rencontrer Loïc et Jules des Isaac Delusion. Trois semaines auparavant, on avait eu la chance de les voir tous les quatres sur scène pour la release média de leur premier album, le charme avait mis tout au plus 10 secondes à opérer. Ils ont fait de la cave du Silencio une cave à ciel ouvert. C’est ce premier album dont on tient à vous parler, et ce d’une manière à la hauteur du plaisir qu’on prend à l’écouter. Abrités sous le point FMR, ils nous confient être des “éternels insatisfaits”, nourris d’une inspiration puisée dans des “suites d’accident”. Mais des jolis, ceux qui nous font aimer un peu la pluie. 

Isaac Delusion

Beware Magazine :  Vous étiez deux sur vos EP, puis 4 pour ce premier album : Nicolas à la basse, Bastien le touche-à-tout. Est-ce qu’on peut affirmer plus globalement que c’est la famille Cracki Records qui grandit depuis vos débuts ?

Loïc : Ouais c’est un peu une grande famille, à la base c’étaient des potes, je connaissais des gens de chez Cracki avant de travailler avec eux depuis mon école de son, quand on a commencé à monter le projet ils étaient intéressés par notre musique, à la base ils ont été orientés par nous et on les connaissait pas super bien avant notre première demo.

Jules : Le côté famille c’est que le label s’est crée 2-3 mois avant notre premier EP, on est montés et on a peu grandi ensemble parce qu’ ils étaient surtout créateurs d’événements. Il n’y avait eu qu’une seule sortie avant, c’était Larcier, un Dj, on est finalement devenu le premier groupe chez Cracki. On a fait le chemin ensemble, c’est pas comme si on avait signé chez un label, c’est plus cet esprit d’évolution ensemble.

Donc, vous sortez votre album le 2 juin, une release public à la Gaîté Lyrique le 10 juin, vous vous sentez comment à l’idée de le dévoiler enfin à votre public ? 

Loïc : On a déjà fait des trucs plus gros mais c’est notre première tête d’affiche dans une salle de capacité moyenne après le Trianon, la Cigale, donc ça reste une date importante. C’est un album un peu moins personnel que les premiers EP, ils étaient plus intimistes puisqu’on ne travaillait qu’à deux, on a ouvert notre musicalité en rajoutant deux musiciens Bastien et Nico qui ont amené pas mal de trucs dans l’album, un mélange de 4 influences bien distinctes plutôt qu’un mélange de nos 2 énergies. On est en fait passés à une structure plus globale, plus collective qui nous correspond pas mal par rapport aux lives, c’est un album composé par rapport à ça, une énergie de plus apportée sur scène.

Isaac Delusion

Loïc, les textes sont de ta plume mais à quel moment ils interviennent dans la création de vos morceaux? Est-ce qu’on peut parler d’un processus de création ou ça marche plutôt aux allers-retours, au compte goutte, à la strate ?

Loïc : Les textes arrivent en dernier comme le dernier ingrédient du gâteau, la musique est déjà composée, sinon c’est un peu comme se jeter dans une piscine sans savoir ce qu’il y a dedans. On fait beaucoup d’échanges entre nous, on fait de nombreuses retouches avant de finaliser. Ça part souvent d’un élément bien distinct, d’un sample ou une mélodie, une voix, un beat… Comme une pyramide, on y rajoute des étages. Il y a toujours un élément déclencheur, le son se construit au fur et à mesure, on part jamais avec un concept mais plutôt avec un élément, on aime bien dire que c’est une suite d’accident.

Jules : Y’a plein de sons qui partent de pas grand chose, les morceaux sont jamais vraiment finis jusqu’à ce qu’ils soient enregistrés définitivement . L’album quand on l’a enregistré on avait des maquettes, des démos mais au final on savait qu’ils seraient pas exactement pareils. Y’avait des morceaux en suspens depuis l’été dernier, d’autres depuis deux ans, ils ont évolués, changés. On est un peu des éternels insatisfaits. Le truc n’a jamais fini jusqu’au dernier moment. On a masterisé l’album et il était prêt à sortir on est revenus sur deux morceaux on a changé des trucs même après tout ce processus.

Vous chantez anglais, toujours. Et là surprise dans le titre de Pandora’s box, une phrase en français. Ça démangeait ?

Loïc : C’est la seule phrase de l’album que je dis en français, petit rappel chauvin, ça peut ouvrir des horizons sur des chansons complètement en français, j’y pense assez souvent, c’est un tout autre processus d’écriture mais ça nous plairait vraiment. Cette phrase elle vient comme une petite blague, une punchline. Ça m’est venu aussi en écoutant ALT-J, ils en balancent quelques unes en n’étant pas du tout français et ça m’a un peu inspiré. J’ai composé un titre en français pour cet album mais le morceau n’a pas collé par rapport aux autres morceaux, on l’a mis de côté. Pour le deuxième album.

She Pretends, elle parle de qui ?

Loïc : C’est une généralité un peu, un cliché, le portrait d’une nana superficielle, reine de la nuit et pauvre la journée. Ce genre de nana qui n’existe que par le paraître et par la façon dont les autres la voient mais le matin elle a la tête en vrac, c’est un thème très générationnel, ça en fait une chanson un peu triste.

Isaac Delusion

Chez Isaac Delusion ou de façon plus générale, on fédère les morceaux dans un album ? C’est un bordel sans nom ou tout est prémédité ?

Loïc :  Euh non, ça dépend de la façon de concevoir un album. Plus ça va, avec la modernité et la technologie, plus la musique est faite pour être consommée dans un ordre aléatoire alors qu’en l’occurrence dans notre album chaque morceau à sa place.

Jules : Surtout le premier “The Child You Were”, ça paraissait évident.

Des collaborations à évoquer ?

Loïc : Pour cet album là, c’est une expérimentation, c’est le début d’une aventure, un point de départ. On avait envie de faire participer plein d’artistes qu’on aime et qu’on connaît personnellement. Pour Isaac Delusion LP, on a engagé le violoncelliste de Revolver, on a été aidé d’un ami violoniste (NDLR : Léo, membre de l’ancienne formation Lucky Lindy de Loïc), on a fait intervenir des pros en ingé son comme Julien Delfaud, des gars pointus, une amie pour les choeurs de Children of the Night. Il y a quelques intervenants mais on a fait ça en huit clos, on voulait faire un maximum de trucs nous même. Parce que quand tu commences à faire participer des artistes professionnels, tu risques d’y perdre un peu de ta musique.

Jules : C’est important de montrer ce que tu es capable de faire avant de demander à d’autres personnes d’intervenir. C’est pour ça qu’on a pas pris de producteur et de réalisateur artistique sur l’album, on tenait à sortir quelque chose de représentatif. C’est pour ça que l’album s’appelle “Isaac Delusion”. On se présente car on espère toucher un public un peu plus large un peu plus lointain.

D’ailleurs vous avez déjà fait quelques scènes en Italie, aux Etats Unis…

Loïc : Ouais, on a fait des trucs cools, mais les États-Unis c’est un territoire assez particulier au niveau de la musique, il y a une activité énorme dans le créneau de l’electro pop et du rock indé, avant de sortir de la masse faut charbonner. C’est très cool d’y être allés mais on a encore du taff.

Isaac Delusion

Pourtant, depuis cette génération de nouveaux groupes du genre electro pop, on a du mal à comparer Isaac Delusion à un autre groupe de par cet univers qui semblent fourmiller d’un tas d’influences assez hétérogènes. On pense d’ailleurs à la reprise de Between the Bars d’Elliot Smith. Mais pour le reste ? 

Loïc : On est issus de pleins de musique différentes, je suis plus sensible à la musique indé, le rock et le folk, plus d’émotions.. Jules est plus dans le world music ou hip-hop, y’a un mélange assez fort…

Jules : C’est dur de définir un style puisqu’en soit, tous les morceaux sont tous différents les uns des autres. Par exemple, tu peux vraiment qualifier She Pretends de morceau electro pop, mais il n’a aucun rapport avec Children of the Night ou Pandora’s box. Du coup, le genre electro pop est un terme générique qui passe partout.

Tout cet univers visuel autour d’un rêve, d’images qui flottent, y’a quelque chose de paranormal, vous le dîtes vous-même. On crée volontairement de la musique un peu mutante ou on est à fortiori un peu des mutants dès le début ?

Jules : J’ai l’impression que ce côté onirique vient du fait qu’on essaie de mettre dans la musique ces émotions fortes, de jouissance peut-être, justement ce sentiment qu’on ressent pendant un rêve, un voyage, cet espèce d’emballement, de liberté, de palpitations. Je crois qu’on a ça en commun à la base et c’est pour ça que ça marche. On essaie de retranscrire tout ça. Loïc est plus dans l’émotion folk, éthérée, atmosphérique et moi plus dans le groove, c’est vraiment caricatural mais on extirpe de nos influences musicales différentes tout ce qui génère le plus d’émotions. Mais on n’essaie pas de mettre le désespoir ou la tristesse, le malheur, plutôt quelque chose de positif.

Ce soir vous faîtes un DJ Set au point FMR, une toute première, qu’est ce qu’on peut entendre ?

Jules : On a absolument rien préparé, on s’est vu deux heures tout à l’heure. Ça permet de partager des artistes que t’aimes bien, ce qu’il y a de plus dansant dans ce qu’on écoute, quand tu joues dans des clubs t’es obligé de passer tel genre de sons mais ce soir, ce sera vraiment freestyle.

Avant de vous échapper, vous pouvez nous résumer l’idée de la beauté en un seul mot ?

Loic : La simplicité.

Jules : La grâce.

On remercie chaudement Loïc et Jules de nous avoir prêté du temps. Mais on est surtout un petit peu troublées par la modestie avec laquelle ils évoquent un joli parcours. On ne peut que vous encourager à les écouter, les voir en concert surtout parce qu’on s’est déjà laissées faire, c’est exactement ça, se laisser faire.

Lien Deezer pour écouter leur nouvel album

Interview réalisée par Alice Colas et illustrée par Victoria Roussel

Isaac Delusion
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Alice Colas
Article écrit par :
Après avoir obtenu une licence en arts appliqués et un master en création-conception en communication visuelle, Alice Colas a travaillé en tant que directrice artistique dans les domaines des médias et de la culture. Par la suite, elle est devenue indépendante en tant que free-lance chez BETC. Sa passion réside dans la composition d'images et la création d'identités visuelles. En tant qu'illustratrice, elle aspire à mettre en avant sa créativité et sa technique pour donner vie à vos projets d'identité, de packaging et d'impression. Son objectif est de créer du sens et de l'esthétique en se basant sur l'essence de votre marque. Dotée d'une approche rigoureuse, précise et ponctuelle, elle s'efforcera toujours de répondre au mieux à vos attentes dans les délais les plus adaptés.

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