Not So Green Fields : Un voyage en Sardaigne avec Dusty Kid

Image d'avatar de OctoxAlfe Bandzouzi - Le 5 novembre 2015

Dusty Kid fait parti de ces artistes qui ont marqué leur génération. En à peu près 10 ans le natif de Sardaigne a produit des morceaux d’une qualité indéniable, ainsi qu’une signature peaufinée et reconnaissable. Beware est allé à sa rencontre lors de son passage au Zig Zag le 10 octobre pour nous faire découvrir son nouveau projet en live.

Dusty Kid

« Finalement ce projet est une façon pour moi de déclarer mon amour pour la Sardaigne »

En 2010 on découvrait le morceau « Psika », 13 min47 de sonorités enivrantes et hypnotisantes, un voyage sensorielle dansant et doté d’une masse sonore ultra puissante. Une basse remarquable et des pads subtilement déposés, à 5min40s du morceau un groove déboitant la suite n’est pas des moindres. L’agressivité du morceau prend place et on danse toujours la tête explorant de multiples choses.

Le jeune prodige a signé des morceaux tels que « Lynchesque » et que dire de cette production, une techno personnelle sortant du lot. En écoutant le sarde il se passe quelque chose, tout en gardant ses atmosphères « de trip intérieur » on clubbe volontiers sur ses sonorités. Les couches sonores qu’il propose sont subtiles, brutales mais l’intérêt pour la mélodie n’est pas mis de côté pour autant. On peut citer « Kore, « Argia », ou le très somptueux « That Hug », le souci de la mélodie et la durée de certaines pistes forment une lecture d’histoire. Ce dernier morceau est très certainement l’une de ses plus belles introspections. La mélancolie se déteint plus l’histoire se raconte et c’est intense. C’est tout naturellement que « Not So Green Fields » nouveau projet du compositeur voit le jour, 2 ans après son dernier projet.

Not So Green Fields - Dusty Kid

Dans ce nouvel opus Dusty Kid excelle comme à son habitude, l’album qui matérialise des années de compositions, l’inscrivant indéniablement dans l’âge de maturité de compositeur, tant par sa démarche que par les sons proposés. La musique électronique est multiple, celle-ci détient par ses sous genre des possibilités infinies et permet à ses activistes d’expérimenter sans cesse. On se réjouit alors lorsqu’un artiste prend un risque et laisse muter son univers pour proposer un projet abouti et fidèle à lui-même. Dusty Kid réalise cela sur ce 11 titres, il développe son univers bien défini, mais une certaine liberté est prise au niveau mélodique. Il ne s’agit pas d’un énième album de techno, mais d’une recherche sonore différente de ses projets précédents. Il se passe autre chose qu’un «voyage intérieur», il s’agit d’un « voyage au cœur de sa terre natale », la Sardaigne.

« Oui, cet album reste une exploration mais d’une autre sorte, celle-ci se passe sur une terre. Finalement c’est toujours une question de voyage. Pour moi la musique doit te procurer de nombreuses choses, des émotions, des découvertes de territoires… Si tu voyages avec la musique peu importe que ce soit dans un pays, dans l’espace ou dans la tête ça restera toujours un voyage. Je pense que c’est une bonne finalité d’en arriver là. »

En effet, l’album raconte autre chose que le dancefloor, il parle de la Sardaigne. « The Wedding », où l’on peut entendre le launeddas, instrument à vent de la musique sarde, ou encore les guitares acoustiques de « Doa » emportent l’album dans un métissage bien réussi. Il faut rappeler que la notion de voyage est autre lorsque l’on écoute les pistes du projet, tout se déroule non pas dans la tête mais entre les montagnes, les paysages et les villes de l’ile méditerranéenne. La techno fait partie de Dusty kid et il serait négligeable de ne pas le retenir comme l’un des activistes les plus pointus de sa génération.

Cependant au bout de ces 10 ans d’expérience, à tourner dans le monde, à créer ces rythmes l’âge passe et la maturité « exige » de nouveaux horizons. « Not So Green Fields » est ce nouvel horizon dans la carrière du prodige sarde. Il propose par ses choix sonores de nouvelles pistes, sans forcément négliger ce qui fait de lui un compositeur de talent. La qualité du sound design reste d’une grande netteté et détient une signature bien reconnaissable, mais il y a ce nouvel apport qui éloigne l’opus de la techno. Il y a des rencontres de cultures qui s’opèrent pour donner naissance à un univers électronique, mais aucunement techno.

« Eh bien, tu dis que c’est différent, que ce n’est pas de la techno je te l’accorde. Au départ je ne pensais forcément faire un album qui rompt avec la techno. Lorsque j’étais en Italie je pensais à l’album que je voulais avoir dans mes mains et ce n’était pas de la techno, c’était électronique mais plus ou moins un mélange. Ces dix dernières années j’ai eu tendance à utiliser la techno pour me montrer aux gens, c’était la part d’exubérance de ma personnalité. Aujourd’hui ça a changé même si j’aimerais toujours la techno. »

Dusty kid montre avec cet album qu’il n’est pas question de se cotonner à un genre musical mais de créer quelque chose de fidèle à sa personne, un travail à l’image de son état d’esprit finalement. Il n’est pas question d’enterrer la techno dans cet album, mais de laisser celle-ci derrière soi. Non pas que le genre un mort, mais pour le compositeur une autre démarche s’est inscrite, en cohésion avec sa vie et son nouvel environnement.

« La raison qui m’a poussé à faire cet album est que l’année dernière j’avais beaucoup temps pour moi. Je passais du temps avec mes amis, j’allais à la plage et j’ai pu redécouvrir certains endroits. C’est à partir de ça que j’ai été inspiré, et que j’ai trouvé une véritable attache pour cet endroit. J’y suis né mais je n’ai jamais vraiment aimé cette terre, finalement ce projet est une façon pour moi de déclarer mon amour pour la Sardaigne. C’est un échange entre ce pays et moi. »

Dusty Kid - Corner

Pour résumer cette nouvelle conception de sa musique, trois mots : « Amour », « Voyage » et « Poésie ».

L’album détient sans aucun doute de la poésie, il nous emporte sur de longs paysages, exprimant de forts sentiments. A chaque morceau son histoire, déroulant au fil de l’écoute de très belles images. « Arveschida » sonne comme une fin de saison devant un couché de soleil paisible et intense. Sensuelle « Masua » et ses nappes confondues au tempo onduleux charmant d’avantage le vocal déposé.

« We Are The Troglodytes » seconde piste, percutante, entraînante, une bassline puissante et cet air tribal mêlant vocal et percussions.

« Not So Green Fieds » est un album lumineux, la noirceur de la techno est mise de côté pour une musicalité plus lisse et plus profonde. C’est certainement ce qui me plait dans cet opus, une fusion entre sa culture natale et la musique électronique. La démarche peut sembler être un abandon de techno, et laisser des déceptions, cependant on ne peut lui ôter sa fraicheur. C’est pour ma part un pari réussi, un risque pris qui vaut d’être souligné.

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