INTERVIEW : une après midi à écouter de la musique chez Yann Kesz

Image d'avatar de Eric RktnEric Rktn - Le 4 janvier 2017

yann kesz

“Qu’aurait fait Madlib à ma place?”

Ruff Mercy nous avait expliqué qu’il se posait constamment cette question dans son travail d’illustrateur.  Il faut croire que Madlib a eu le même effet sur Yann Kesz, une claque qui a changé radicalement sa perception du son, avec pour conséquence l’envie irrépressible de trouver d’autres morceaux aussi traumatisants, en fouillant dans les bacs à vinyles dans les années 90, via Myspace plus tard ou en creusant des playlists dans des recoins obscurs de Soundcloud. Un sens de la curiosité sans fin qui s’entend dans la richesse de la musique qu’il produit, poussant le label Nowadays à s’ouvrir de plus en plus de jeunes artistes inconnus, et c’est tant mieux.

Yann Kesz: J’ai commencé…C’est drôle, je ne sais même plus, mais ça fait très longtemps. C’était à l’époque où je voyais David Scheer, et Cyril qui bossait sur Générations.

Beware: Il faut que tu m’expliques qui est David Scheer parce que c’est impossible de trouver des informations sur lui.

YK: C’est vrai, à l’époque j’étais signé sur  la maison d’édition du 113 et DJ Mehdi quand il était encore dans sa période hip-hop, on a bossé un peu ensemble, c’est d’ailleurs grâce à lui qu’on a signé là bas. C’est aussi grâce à lui que j’ai pu avoir des disques sortis sur Chromowax.

B: Mehdi travaillait sur quoi à l’époque, le 113?

YK: C’était vraiment le début, il bossait surtout avec Different Teep. J’allais chez lui pour écouter des beats, j’enregistrais mon premier projet dans les mêmes studios qui se trouvait sur Opéra, je crois. Je me souviens que Fred Dominguez mixait les projets, c’était comme une petite famille.

B: Justement, comment tu as vécu l’arrivée du hip-hop en France dans les années 90?

YK: On écoutait beaucoup de rap américain, on regardait ce qui se passait ailleurs et on se disait “tiens, pourquoi ne pas essayer”. On écoutait aussi beaucoup ce qui se faisait en France par la radio avec Générations et Radio Nova. après je ne peux pas dire comment c’est arrivé, à la base je viens du graffiti, c’est une suite logique.

yann kesz

B: C’était la période où tout le monde faisait tout dans le hip-hop, le graff, la danse, le rap.

YK: Carrément, il y avait un vrai truc. Il y avait des bandes, les RG, les BD…Il y avait quelque chose d’intéressant et en même temps un peu dangereux, pas palpable mais qu’on voulait toucher alors qu’on était jeunes, j’avais 14 ans.

B: C’était quoi ton blaze?

YK: J’avais un grand oncle qui s’appelait Physique, du coup c’était Physique à tagguer (rires). c’était trop long, tout le monde me prenait pour un fou de tagguer ce nom. Un jour j’ai fait un RER avec un lettrage énorme, je ne me souviens plus si c’était bien ou pas, mais à l’époque on avait beaucoup d’égo. Il y avait un vrai esprit de compétition mais cool, on voulait se dépasser, mais plus tard, j’ai raccourci: Physique est devenu Zeak, qui est devenu Kezy, qui est devenu Kezyann, qui est devenu Yann Kesz.

B: OK!

YK: Il y a une suite logique dans tout ça. Du coup, si tu cherches Kesian, tu pourras retrouver des vieilles productions que j’ai faites à cette époque.

B: Tu as commencé la musique en même temps que tu graffais?

YK: C’est venu après en fait, en rencontrant des gars, on découvre des choses. C’est marrant, j’ai découvert le rap au collège, j’écoutais énormément de musiques. Je me rappelle ce jour où un grand du collège est venu me voir, et m’a filé une cassette à écouter. C’était le genre de mec qui s’y connaissait vraiment, je me suis retrouvé à écouter tout ça en me disant « c’est trop chanmé ». On avait des discussions autour de ça, je me suis laissé emporter. C’était la même chose pour le rap, j’écoutais de la funk et un mec m’a dit « écoute ça, c’est le futur », là je crois que j’ai vraiment pris la claque de ma vie. A l’époque, il fallait être un vrai chineur pour dégotter ces tracks en France, j’ai découvert Public Enemy, Run DMC, EPMD Biz Markie. Certains morceaux me donnent encore des frissons aujourd’hui. Il y avait une musicalité que je trouvais énorme, je me posais pas mal réalisations de ces tracks.

B: Tu as rappé aussi?

YK: bien sûr (rires), j’ai fait un peu de danse aussi, j’ai graffé et j’en suis venu au rap. Un pote avait un 4 pistes, il faisait poser ses potes qui sont devenus les miens. Je regardais ça sans trop m’y intéresser, jusqu’au jour où un pote proposé de créer notre groupe. J’ai découvert à ce moment là qu’un mon pote faisait du son, je ne savais même pas que le mec avait des vinyles, il nous ramenait des cassettes et les gens rappaient dessus sans se poser de questions. A l’époque, il fallait s’y connaitre, savoir ce qu’était un sampler etc, tout était du bouche à oreille, on n’avait aucune information sur la façon dont se faisait le son d’EPMD, tu vois. Le jour où j’ai vu son matériel, un atari ST et un sampler Akai s1000, j’ai pas arrêté de lui demander son process, et je suis tombé amoureux direct, le coup de foudre. D’ailleurs il m’en a voulu très longtemps parce que j’avais arrêté de rapper du coup!

B: Comment s’appelait le groupe?

YK: ah c’était très original, c’était “Esprit Commun”. Tu connais Common Sense, le premier groupe de Common? Ben voilà (rires). j’ai eu beaucoup de chance pour trouver du matériel, je suis tombé sur l’annonce d’un mec qui vendait un système son avec des enceintes, des amplis et deux samplers, le prix était tellement dérisoire, je n’y croyais pas. J’ai acheté ça pour une bouchée de pain, et j’ai commencé à faire du son à ce moment-là. Mon premier vinyle, c’était Herbie Hancock – Death Wish (ndlr “un justicier dans la ville”), une série avec Charles Bronson complètement folle. Et quand j’écoute ça, je me rappelle du film, c’était aussi une première parce que je n’avais jamais écouté de bande originale. C’est super riche, il y a des samples de trop de gars là-dedans, notamment de La Cliqua.

Je commençais à faire des productions à la cool, dans mon quartier il y avait pas mal de potes qui chantaient ou rappaient sans vraiment prendre ça au sérieux, jusqu’au jour où un pote à décidé de faire un freestyle sur un de mes sons. Il y avait un feeling, on n’avait rien décidé ensemble. Je veux dire, même ma soeur qui écoutait me disait “ça défonce” et a commencé à faire un freestyle dessus, mon voisin de palier s’y est mis aussi, son pote s’est ramené dedans…

B: C’est marrant, c’était vraiment un truc organique.

YK: C’est vrai, j’avais jamais demandé à ces mecs de venir rapper, on a fait pleins de morceaux pour le plaisir. Du genre on faisait ça devant les parents à Noël.

B: C’était vu comment par les gens plus âgés qui ne connaissaient pas du tout le rap?

YK: C’était un peu la bête noire, je crois que c’est ce qu’on aimait aussi dedans. Ca nous faisait défendre ce mouvement dans tout, dans la danse, dans la façon de s’habiller, il y avait ce côté où on était un peu en marge. On aimait ça parce qu’on rencontrait des gens passionnants tous les jours, c’est marrant parce que c’est quelque chose que je n’ai pas vraiment choisi en fait. Ca m’est tombé dessus, je me rend compte que c’est assez compliqué d’en parler, je n’arrive pas à mettre les mots dessus tellement ça s’est fait naturellement. Après, il y avait ce côté contestataire qu’on retrouvait dans les paroles, à propos de la condition humaine dans les quartiers, on suivait un peu ce mouvement où on se reconnaissait.

B: A quel moment tu t’es dit que ça allait être ton métier?

YK: A partir du moment où j’ai gagné du fric (rires) !

B: Après un concert?

YK: En fait non, on avait fait pleins de concerts avec MESS BASS, mon premier groupe avec ma soeur et mon cousin ET UN VOISIN. On avait sorti un EP, puis un album en vinyle. On avait un pote beatmaker qui croyait en nous, il avait gagné au loto et il s’est dit « allez, je vous paye ça », c’était complètement ouf mais c’est vrai. On jouait le jeu, moi je produisais tout le temps en studio, parce qu’avant il n’y avait pas de home studio. Du coup on rencontrait des gens, il y avait une sorte d’énergie et donc des tonnes de compilations qui sortaient, il y avait moyen de poser des productions partout, on n’en avait rien à foutre, on faisait ça pour le plaisir. Ce qui fait que je me suis retrouvé avec des gens plus ou moins connus, comme Zoxea ETC…

B: J’ai l’impression que c’était vraiment l’esprit sans calcul, même dans les métiers qui se sont construits autour du hip hop, je pense à Mouloud Achour par exemple.

YK:C’est ça. Je trouve qu’il y a une éducation dans le hip-hop, que ce soit dans la création d’un label, une marque de fringues, monter un studio…En fait, tu apprends à être un entrepreneur. Je sais que je suis hip-hop dans l’âme, je pense que si je n’avais pas ça, je ne sais pas ce que je ferais en fait, sérieusement. Et si je n’avais pas rencontré ces gens qui eux aussi ont découvert ça et ont fait avancer ce mouvement ensemble. Ça m’a donné une direction, je l’ai suivie tête baissée et aujourd’hui je suis là. Pour revenir à ta question, j’ai pris le hip-hop au sérieux à partir du moment où mon pote qui devait signer chez l’Ariana, m’a dit qu’il cherchaient des gens pour faire du son. J’ai commencé comme ça et je ne me suis plus arrêté. Du coup, on s’est retrouvé en studio avec pleins pas mal d’artistes, Oxmo Puccino par exemple, même si le projet a été avorté, ou Matt Pokora quand il est sorti de la Nouvelle Star… etc

B: Comment c’est de travailler avec Matt après avoir produit uniquement des rappeurs?

YK: En fait, j’ai vu un mec qui m’a assez étonné, qui savait ce qu’il voulait. Quand on a discuté sur ce qu’il voulait faire, c’était ambitieux, mais ça ne me correspondait pas forcément. Après on était durs sur le choix des artistes à produire, il y avait une sorte de street cred’ à défendre (rires). On avait également bossé sur un projet avec Busta Flex et la protégée de Passi, je ne me rappelle plus de son nom, c’est honteux.

B: Qu’est ce qui t’a fait changer de noms et de projets par la suite?

YK: J’ai commencé à écouter d’autres choses, j’avais découvert un track qui m’a rendu complètement fou, je crois que c’était un morceau de Madlib, il y avait 6 ou 7 rappeurs dessus, je me suis pris un claque monumentale parce que je n’avais jamais entendu ce genre de flow et de musique, comme la claque avec Spacek sur une production de J Dilla, qui passait sur Nova d’ailleurs.

Ces deux morceaux-là ont changé ma vision de la production musicale, mais radicalement. J’ai continué à fouiller dans ce genre là, à ce moment il fallait acheter des vinyles, je cherchais vachement ce genre de sons. J’ai découvert un autre univers musical, j’ai cru que j’allais me perdre parce que c’était indé de ouf (rires). Mais c’était génial, c’était le temps de Myspace, un des meilleurs outils créé pour l’échange de musiques pour la communauté. Les gens étaient ultra accessibles, grâce à ça j’ai pu faire des choses géniales, notamment avec Onra qui m’a mis en connexion avec pleins de gens.

B: Tu as rencontré Onra par Myspace?

YK: Oui, j’ai découvert qu’on avait le même centre d’intérêt niveau artistes, moi qui suis une bille en connexion ou com, lui avait plus de aisance. Sur Myspace, il y avait un truc assez naturel où on parlait musique. J’avais besoin d’un mec qui me connecte, comme lui qui l’était avec pas mal de gens que j’aimais bien, on s’est rencontré, beaucoup échangé sur nos gouts respectifs en zik, il m’a appris beaucoup de choses, et vice et versa.

B: Quand tu as eu internet, tu étais du genre à télécharger à mort du coup?

YK: Blogspot ! C’était incroyable, c’était pour moi une révélation. Tu chopais des disques inaccessibles, que tu ne peux pas acheter. J’allais fouiller dans des blogs ultra rap, qui sortaient des cassettes à 200 exemplaires. Les mecs qui tenaient ces blogs étaient hyper motivés, j’en ai des disques durs remplis que je n’ai jamais écoutés. Je téléchargeais, mais je n’avais pas le temps de tout écouter. Ca ne ne m’empêchait pas d’acheter des vinyles. J’avais des achats impulsifs, une écoute impulsive même je dirais.

B: A quel moment tu t’es mis à la musique électronique?

YK: C’est marrant, je ne sais pas si j’en ai vraiment fait en fait. Je suis pas un raciste de la musique, je m’en fous un peu du genre, autant de la new wave que du cosmic jazz, tant que ça me parle. Je suis juste sensible aux sons, à ce qui va m’intéresser, dans tous mes sons il y a du sample.

B: Ca veut dire que tu n’as pas l’impression d’appartenir à un genre particulier?

YK: Si, le hip-hop, quoiqu’il arrive, c »est mon genre par définition. Je suis très attentif au flow, quand j’écoute des featurings de gars qui rappent à la suite et qui défoncent, je suis comme un enfant, tu vois ce mec qui kiffe sa musique dans sa voiture? Pareil (rires). Je me souviens par exemple d’un titre où Earl Sweatshirt entre en dernière partie.

B: Pour avoir connu le hip-hop très tôt, tu n’as pas le discours du puriste hater qui dit que c’était mieux avant

YK: Pas du tout, au contraire. Ca reste de la musique, il y a une continuité, une évolution . Au delà d’être dans l’air du temps, il faut juste être curieux. Je n’essaye pas de comprendre , ça me touche ou pas. Par exemple, il y a des mecs qui me mettent des claques de ouf en trap aujourd’hui, même s’ils ont le même flow.

B: C’est qui tes dernières claques récentes ?

YK: En rap français, j’ai découvert Makala il n’y a pas longtemps à travers ses deux derniers clips, c’est une claque.

B: Avec tous les albums de producteurs qui sortent en ce moment, tu as l’impression qu’on leur donne enfin la place qu’ils n’avaient pas avant?

YK: Je sais pas, c’est 50-50 en fait, après c’est intéressant qu’on les voie plus, ils apportent leur histoires et les gens se reconnaissent dedans. Les productions sont très riches aujourd’hui, certaines n’ont plus besoin d’avoir un rappeur dessus. Un beatmaker, comme pour un jazzman, a parfois besoin de s’exprimer selon sa vision.

B: Tu expliques comment que beaucoup de producteurs français s’exportent à l’étranger pour produire? Je pense par exemple à STWO, ou Astronote.

YK: Ce qui est intéressant avec Astronote, c’est qu’il est encore là, je l’ai connu quand il faisait encore des intrus pour Benzen. Sa musicalité est clairement inspirée des Etats-Unis , nous aussi, mais on y met notre propre touche. C’est assez logique de passer par là parce que tu as peut être besoin d’être rassuré, savoir si tu es sur le bon chemin, du coup tu vas là bas pour voir comment ça se passe.

B: C’est marrant, je connais pas mal de producteurs qui contrairement à toi n’écoutent pas du tout de musiques, parce qu’ils ne veulent pas être influencés quand ils produisent. Tu ne te dis pas parfois que tu as tellement le choix que finalement tu ne sais pas vers où aller?

YK: Non, du tout. Il y a juste un moment où c’était difficile de produire, mais c’est parce que je me posais pleins de questions sur moi, et ça a un impact sur tout ce qui se passe dans ta vie. Et puis tu y réponds et tu reprends ton train train.

B: Je pensais à Awir Leon qui s’est vraiment inspiré de ses 4 dernières années pour poser ça dans son premier album.

YK: Ca sert la musique, je pense que c’est juste une extension de soi en fait, tu parles avec ton coeur. Et c’est marrant parce que ça se ressent vraiment. J’essaye d’avoir un regard positif quand je vois tout ça, ça ne nous dessert pas, toucher le fond, savoir qui on est vraiment, c’est la façon dont on l’exprime après.  Quand j’écoute ce que je produis aujourd’hui, ça me fait du bien.

B: A quel moment tu arrêtes de produire pour toi pour le faire partager aux autres?

YK: Quand tu vas bien en fait, quand tu te sens prêt. Autant je produis pour moi sans m’arrêter parce que je ne peux pas, c’est mécanique, je ne peux pas faire autrement. Mais à ce moment je suis dans une recherche de moi, pas vraiment une recherche musicale, mais quand tu es prêt, tu produis vraiment, tu réécoutes ce que tu as fait avant et tu pioches. C’est limite surnaturel, parce que quand tu réécoutes, tu redécouvres ton morceau tu vois.

B: Il y a une limite aussi à ça non? Par exemple 20Syl me disait qu’il ne savait pas si son album sortirait un jour, tellement il est en train de le faire évoluer sans arrêt.

YK: Je pense qu’on a tous un peu ce syndrome, j’ai eu une période où je mettais beaucoup de temps à sortir un morceau. Au delà de la confiance en soi, c’est se poser la question “à quel moment le morceau est fini?”. Et tu rajoutes tout le temps en te disant que ça pourrait être mieux, tu changes le kick parce qu’il ne te plait pas finalement, tu trouves toujours quelque chose. Je pense que c’est la dépression du beatmaker qui n’arrive pas à délivrer (rires). J’ai découvert Arthur Russell il n’y a pas longtemps, j’ai adoré son process: il produit tout le temps, en faisant tout et n’importe quoi. Ce qui m’intéresse dans sa façon de faire c’est que son morceau, fini ou pas, il s’en fout, il le balance. En écoutant sa discographie, je me suis rendu compte que c’était le cas, du genre il a 60 versions d’un même morceau mais fait de façons différentes.

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B: C’est pas un peu relou pour son public qu’il n’arrive jamais à se fixer sur quelque chose?

YK: Je ne sais pas. Mais quand il est mort, des chineurs ont déniché sa discographie, on ressorti son histoire, et je trouve ça bien. C’est toujours une histoire de kiffE finalement, il faut avoir de bons mentors, suivre un mouvement et faire tout avec plaisir. On ne réinvente pas la musique mais on se réinvente soi même, il faut s’écouter. Moi je ne me donne pas de limites, si j’ai envie demain de faire du hip-hop, je le fais, si j’ai envie de faire de « l’électro”, c’est pareil. Comme l’album que je suis en train de préparer, ça sera un peu « electro” mais si j’ai envie qu’il y ait un chanteur indien pour mettre une ambiance chamanique, je me fais plaisir.

B: Tu peux me parler de ton passage d’un gros label à un indé comme Nowadays?

YK: J’ai toujours écouté et suivi les petits labels en fait. Avec Nowadays, on se connait depuis Myspace via nos travaux respectifs. j’étais dans une période où je faisais de la musique perso et pour la publicité parfois.

B: Tu étais devenu un vendu.

Yk: Oui (rires). Non mais il fallait que je gagne ma vie, j’avais un appartement qui coûtait très cher (HAHA). j’avais des opportunités pour le faire et c’était cool. C’est en faisant ce genre de musique que Nowadays est tombé sur moi, c’était un morceau avec Buddy Sativa. Ils se sont retrouvés à le vendre pour une pub qui a plutôt bien marché, c’était un morceau qu’on avait fait pour délirer, et ils m’ont proposé de sortir un projet chez eux dans la foulée. ce sont devenus des amis maintenant.

B: Avec tous ces labels indés, tu sens un mouvement similaire à l’arrivée du hip hop dans les année 90?

YK: Carrément, je trouve que c’est juste une évolution. Avant-hier par exemple, je suis tombé sur une chaine Youtube où le mec a mis 1300 tracks français, j’ai regardé et je me suis pris pleins de claques. On a eu une époque où on vivait avec un rap que j’appelle  “craque nuque” , on était tous dans ce délire, tu entrais dans une salle et tu voyais 200 têtes bouger de la même manière , c’était un peu flippant. Aujourd’hui, tu arrives dans une salle, les mecs turn up. Avant tu ne dansait pas sur du rap français, maintenant beaucoup plus.

B: C’est un peu à cause de toute cette tradition de la poésie française non? Maintenant les gens s’en foutent des paroles, regarde PNL

YK: Voilà, encore que PNL c’est différent. Il y a des mecs comme Myth Syzer qui font des beats, on va danser dessus parce qu’il est fat, Ikaz ou Dtweezer, tous ces mecs là. Je trouve que c’est une évolution très cool, je valide à 200%. Aujourd’hui, créer une structure, c’est de plus en plus facile. Tu n’es même pas obligé d’avoir un label.

B: Tu travailles sur quoi en ce moment?

YK: Je sors bientôt un projet chez Nowadays, à partir de tous ces beats que j’ai créés depuis des années. On a fait une écoute avec le label, et ils ont trop kiffé. C’est super motivant, du coup on va le proposer sous forme de live beat, on est pas loin du dj set, mais ce sont mes morceaux, c’est assez cool. C’est vraiment une découverte d’un univers, c’est une sorte de parenthèse, je me suis fait plaisir en les faisant, c’est comme si c’était des morceaux que j’avais fait juste pour moi, c’est limite égoïste en fait (rires). C’est quelque chose que j’ai gardé longtemps parce que je produis pour moi, et que maintenant je vais partager. Le label a compris mon process de produire sans arrêt, ils me laissent carte blanche. En plus, j’ai aussi la possibilité de faire découvrir des petits artistes qui ne seront pas forcément liés à Nowadays. Ce n’est pas vraiment un label, mais une plate forme qui m’appartiendra. C’est marrant, c’est comme une nouvelle aventure qu’ils me proposent, on va voir ce que ça va donner, mais c’est déjà ce que fait le label en cherchant des mecs pas connus, comme Awir Leon.

B: Derrière tout ça, c’est quoi le but?

YK: Je sais pas, je pense que le but c’est être libre de faire ce qu’on veut. On n’a qu’une mort, du coup il faut juste en profiter un maximum, en faisant de son mieux pour faire attention aux gens qui t’entourent, avoir une bonne attitude. Il n’y a pas de leçon à donner, tout n’est pas bon, mais il y a de bonnes choses. Je fais de la musique parce que ça me fait juste kiffer et si on peut kiffer ensemble, tant mieux. Finalement, je dirais libérez-vous, trouvez votre place et faites vous plaisir.

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Eric Rktn
Article écrit par :
Poète en freelance, papa de Le Noeud Pap' Magazine. Twitter / Instagram: @eric_rktn

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