En ce mercredi 9 septembre, débarque sur nos écrans une nouvelle comédie française réalisée par Jean-Paul Salomé et sélectionnée au festival de l’Alpe d’Huez (une fois n’est pas coutume). Portée par Isabelle Huppert, astucieusement utilisée à contre-emploi, La Daronne met en scène une interprète judiciaire franco-arabe qui se retrouve à écouler plus d’une tonne de cannabis au vu et sus de ses confrères de la police. On retrouve également au casting Hippolyte Girardot et Liliane Rovère (10 pour cent).
La lumière s’éteint, les discussions s’étouffent et le film commence par une interpellation musclée dans une barre d’immeubles. A l’opposé de la porte défoncée au bélier, La Daronne débute sans fracas : rythme poussif, alchimie bancale entre les comédiens, dialogues artificiels…
Puis, la daronne apparaît. Le film se métamorphose alors et gagne en profondeur. Le réalisateur dresse un beau portrait de femmes, les hommes étant totalement relégués au second plan. La véritable intelligence du long-métrage est de ne pas se faire l’étendard d’un féminisme revanchard, à l’instar du récent Filles de joie, d’un mauvais goût extrême. Bien au contraire, ces personnages féminins existent non pas en opposition au patriarcat mais tout simplement en tant que femmes, avec leurs forces et leurs faiblesses. Chacune, la daronne au premier plan, évolue dans un monde « d’hommes » sans pour autant devoir se battre plus qu’un autre, s’imposant naturellement et déstabilisant les p’tits caïds. C’est justement parce qu’elles sont des femmes qu’elles tirent leur assurance, perturbant ainsi l’ordre établi. Les dealers sont pris au dépourvu… Que voulez-vous dire à un p’tit bout de femme, 50 kilos tout mouillé qui vous vend son poids en shit et ne tolère pas les négociations ? C’est la daronne qui mène la danse et elle n’a pas eu à batailler pour ce faire.
Jean-Paul Salomé s’approprie des clichés gros comme des maisons (les arabes au kebab, les chinois blanchisseurs d’argent) sans tomber dans l’excès, grand piège de ce genre de films. On se rappelle encore du regrettable Paulette avec Bernadette Lafont, gentille grand-mère et dealeuse à ses heures perdues.
Bien-sûr, on peut reprocher une mise en scène très convenue ainsi que des rebondissements somme toute assez plats. Il n’empêche que La Daronne peut se targuer d’être une comédie dramatique intelligente et profondément ancrée dans son époque. Notre société est en pleine mutation, les femmes s’affirment, reprenant progressivement ce qui leur est dû, les différences deviennent des forces… Tout du moins c’est ce vers quoi nous essayons de tendre et le nouveau film de Jean-Paul Salomé le confirme.