JO revendique sa créativité débordante, une qualité essentielle pour trouver les dessins de presse qui feront mouche.
Enseigner en tant que dessinateur de presse
« A tout moment, du matin au soir je peux avoir une idée qui surgit. Je griffonne, dans l’impulsion, quand c’est encore frais. J’ai constamment des idées de détournements et de caricatures donc c’était naturel pour moi d’en venir au dessin de presse » s’exclame-t-il. Toujours plusieurs dessins sur le feu, il peut en publier un à trois par jour. Difficile de gagner sa vie en tant que dessinateur, une des raisons pour laquelle il est professeur depuis 5 ans. Une profession où il peut réinvestir cette créativité dans un cadre différent. En salle de classe, il éveille la curiosité, le sens de l’improvisation et le goût pour le dessin de ses élèves.
Enseignant dans la seule école d’un village de campagne en manque de moyens, il doit faire classe tambour battant aux élèves du CP au CM2, un vaste programme qui ne l’empêche pas de griffonner entre deux cours. Cinq ans, c’est aussi son nombre d’années de pratique du dessin de presse, un outil exutoire pour transmettre son indignation : « Dès le début, j’ai cette envie tenace de transmettre mon indignation et d’informer à travers mes dessins ».
Très tôt il admire des dessinateurs de presse célèbres comme le regretté Cabu de Charlie Hebdo ou encore Marc Large et Thibaut Soulcié dont il dit s’inspirer énormément pour la simplicité de leurs dessins. Ce goût invétéré pour la caricature l’a toujours animé. Pour lui, un bon dessin de presse doit être cinglant, les répliques satiriques et percutantes. L’humour noir sert à dénoncer et permet de mieux digérer l’actualité : « Le dessin fait prendre une forme de recul sur l’actualité ». Autodidacte, il n’a pas de formation en dessin et privilégie les coups de crayon rapides, dessinant au crayon puis colorisant ensuite au feutre. Maintenant, il utilise davantage Photoshop.
Jo est un adepte des dessins à la main où le crayonné est aussi central que la partie écrite : « J’aime vraiment avoir le sens de la formule. J’adore les jeux de mots et les slogans qui détonnent. Par exemple pour mon dessin publié sur le Black Friday, j’ai eu l’idée du slogan Tout doit disparaître ».
Informer et dénoncer
Johan Danielis affirme que le dessin de presse est un formidable support pour vulgariser : « L’excès qu’on retrouve dans la caricature exprime une réalité parfois crue. Quand on a du mal à trouver les mots pour s’exprimer, le dessin permet de comprendre certaines choses, de se retrouver à travers une idée et même de fédérer des colères. En deux mots et trois coups de crayons, on peut expliquer simplement un fait d’actualité ». Et dans la pure tradition des dessins de presse, Johan Danielis a pour cible favorite le gouvernement : « Pour moi, c’est un gouvernement de communication et c’est très facile de dénoncer ça dans un dessin ! Mes dessins sur la retraite et les gilets jaunes sont dans cette optique ».
Comme bon nombre de dessinateurs de presse, Johan choque. Confiant, il ne vacille pas face à des commentaires haineux : « Il y a des dessins qui unissent beaucoup de gens. C’est souvent en lien avec la politique ultralibérale ou le mépris de la destruction des services publics. A contrario, tout ce qui concerne les violences policières, clive énormément ». Sa principale source d’inspiration en bon dessinateur de presse ? L’actualité bien sûr : « Elle me nourrit. Je capte les interviews les plus marquantes. Je me renseigne grâce aux vidéos YouTube mais aussi en regardant les principales chaînes d’infos télévisés tout en lisant des médias alternatifs comme Médiapart ».
Trouver un juste milieu entre rire et révolte
Pourtant, malgré son succès grandissant, il a dû faire preuve de persévérance pour gagner en visibilité. Le plus dur pour Johan, nous avoue-t-il, est de tirer son épingle du jeu dans un milieu où les dessinateurs de presse ont souvent la même idée de dessin. Ne pas tomber dans un pessimisme immobilisant est nécessaire : « Je ne veux pas que mes dessins soient trop pessimistes donc il faut trouver un juste milieu entre rire et révolte. Il ne faut surtout pas que le dessin assomme ».
Il a lancé une page Ulule permettant de récolter des fonds pour financer ses projets de dessins de presse. Son imagination l’a encore poussé hors des sentiers battus quand il a décidé de mettre au point une page Jolio Editions mettant en avant des couvertures de livres satiriques détournant des clichés littéraires et des faits d’actualité.