Au travers de photographies humanistes et de témoignages d’un espace bouleversé par la guerre et les luttes sociales ou politiques, Yann Renoult, photographe indépendant, saisit une série de photoreportages inouïe afin d’ « enseigner et d’informer pour ne pas oublier que des femmes et des hommes luttent et vivent pour leurs libertés et leurs droits » (Yann Renoult par Dimitri Beck, Le Salon de la Photo – Les Poulains 2015).
Yann Renoult photographie depuis 2011 le quotidien bouleversant des conflits qui animent la Syrie, le Kurdistan, la Palestine, la Turquie, l’Irak. Son attention se porte sur les minorités au sein des oppositions régionales tels que « la lutte des femmes au Nord de la Syrie » ; les réfugiés, notamment lors d’une série photo nommée « Istanbul faux havre de paix pour les réfugiés Kurdes de Syrie » traitant de la difficulté des conditions de travail dans les entreprises de textile, plus gros fournisseur d’emploi à Istanbul ; la résistance palestinienne face aux attaques israélites ou encore en Turquie à Diyarbakir « les mille et une facettes de la résistance civile », entre autres.
L’anormalité représentée par les captures interrogent et visent à s’interroger, Yann Renoult demande d’ailleurs « quel futur pourront bâtir ces jeunes palestiniens qui ont grandi dans un univers de violence en proie à une tension permanente, écrasés sous le poids de l’occupation ? ». Alors, les portraits effectués sollicitent une prise de conscience générale et symbolisent la reconnaissance du photographe quant au dévouement des victimes : « Aida Camp – I. est un soldat d’élite du Fatah. Il s’est engagé à 16 ans, et a été entraîné en Russie et chez les marines jordaniens, avant de servir à Ramallah. Il vient de signer un dernier engagement de sept ans. I. n’est pas entré dans l’armée par conviction, mais pour avoir un travail et toucher un salaire. Ses cicatrices témoignent de sa vie, entre les corrections infligées par son père et l’armée. Agé d’à peine 23 ans, il est brisé moralement par un désespoir profond et intense, qu’on retrouve chez beaucoup de jeunes de son âge dans les camps. Il aimerait vivre une vie normale, pouvoir voyager, faire la fête avec ses amis, se marier. Etre insouciant, loin de la guerre et des morts. Mais en Palestine, ces espérances simples sont hors de portée. Alors I. noie sa détresse dans tout ce qu’il peut. La veille, un de ses camarades s’est tiré une balle dans la tête, porte de sortie à une vie sans espoir. »
Mais, la diversité du travail de Yann Renoult transporte jusqu’en Europe, à Venise ou en France, avec cette fois-ci une poésie plus douce : « C’est à travers la mise en scène d’Hugo Pratt que j’ai voulu voir le grand théâtre à ciel ouvert de la ville, où jouent des acteurs parfois masqués et parfois visage à nu sous la lueur des rayons du soleil. Venise devient alors une ville mystérieuse. En se faufilant dans les étroites ruelles invisibles à la foule des touristes, on débouche sur de petites cours propices à la rêverie. Les rues obscures, traversées de raies de lumières, dévorent les passants dans leur ombre. Ils finissent par ressembler aux personnages d’une comédie grinçante et sombre, dans une scène sur laquelle on aurait oublié de laisser tomber le rideau. Et si le voyageur se lasse du spectacle de la ville, les canaux le ramènent immanquablement vers la mer, invitation à s’embarquer vers un Orient pas si lointain, sur les traces des marchands de la Sérénissime” et Venise se dessine ici non plus par l’image mais par les mots. En outre, l’écriture poursuivant l’image, notre image propre se façonne guidée par la rêverie du photographe.
En somme, grâce à un moment d’échange partagé avec les différents peuples rencontrés, les saisies du photographe, luttant aux côtés des sociétés pour leur reconnaissance, sont lumière sur l’actualité des évènements du Moyen-Orient et parviennent à faire connaître et reconnaître la difficile situation de la région.