La sélection d’artworks de juin par Néoprisme

Image d'avatar de BastienStisiBastien Stisi - Le 16 juin 2016

Tous les mois, le magazine Néoprisme et son fondateur Bastien Stisi, spécialisé dans l’analyse des pochettes d’albums, nous font leur sélection des artworks les plus marquants des 30 derniers jours.

1. Oiseaux-Tempête x Frédéric D. Oberland – Unworks & Rarities

Lorsque le hasard fait (très bien) les choses. Comme pour la pochette d’ÜTOPIYA?, réutilisation du travail du photographe turc Yusuf Sevinçli que le groupe avait découvert lors d’un concert agité, le visuel qui illustre ce nouvel album d’Oiseaux-Tempête, il est tombé par pure coïncidence sous les yeux de Frédéric D. Oberland, sur les parois des églises troglodytes de Cappadoce en Turquie, entre la vallée d’Ilhara et Gorême, ex appartenance territoriale du gigantesque Empire Byzantin. Un document de ce qu’il reste, vieilli mais survivant. Et un écho parait à la musique chercheuse de vestiges et de traces d’Oiseaux-Tempête.

oiseaux-tempete-frederic-d.-oberland-unworks-rarities

2. Alexandre Chatelard x Akatre – Elle Était Une Fois

Chez Alexandre Chatelard, qui fait paraître son premier album chez Ekler’o’shock, l’amour, sujet central du disque, est synonyme de sacrifice. Celui que l’on fait en offrant un bain de pieds à l’autre (avec huiles essentielles réparatrices) afin de faire en sorte que l’être aimé aille mieux. Signé par l’élégante agence Akatre, déjà vue au cours des derniers mois via les artworks de Lafayette, de Benjamin Clementine ou d’Aaron, cette mise en scène du bain s’inspire d’un autre, célèbre, celui peinturé par le néoclassique avec Marat à l’intérieur, juste après son assassinat par la Girondine Charlotte Corday (on est alors en pleine Terreur révolutionnaire). Inspiration revendiquée, de là à considérer cette jeune fille en train de laver les pieds d’Alexandre, comme une Charlotte Corday en puissance ? L’amour répare, et l’amour assassine.

alexandre-chatelard-x-akatre-elle-etait-une-fois

3. Pégase x Romain Leme – Another World

La pochette du 2nd album de Pégase est en réalité une affiche de film. Celui que la réalisatrice Éléonore Wismes (déjà auteure du clip de « Pan Peter » de Rhum For Pauline, eux aussi signés chez Futur Records) a conçu pour illustrer Another World, via trois clips (ceux de « Be Wild », de « Well Bell » et de « The Black Snow ») que la trame narrative et esthétique générale lie les uns avec les autres. On retrouve ainsi sur le visuel conçu par le dessinateur Léo Lemet les enjeux et les éléments centraux de la trilogie, du buste d’Adèle (cheveux châtains, yeux verts, bouche pulpeuse) à cette montagne dont elle convoite les hauteurs durant le clip de « Be Wild » en passant par ces eaux, agitées, où l’on a bien cru qu’elle allait basculer au terme du dernier épisode. Tout est logique.

pegase-x-romain-leme-another-world

4. Anohni x Inez and Vinoodh – Hopelessness

Réalisée par les Néerlandaise Inez van Lamsweerde et Vinoodh Matadin, la cover de ce dernier album, en noir et blanc comme la plupart de ses prédécesseuses, montre en effet le visage d’Anohni de face, les yeux rivés vers le spectateur qui oserait soutenir le regard. Les cheveux sont dans le vent, et la sensation du faciès multiplié et spectral rappelle les pochettes de The Acid ou de James Blake. Comme une superposition de plusieurs visages, de plusieurs couches, de plusieurs membres, de plusieurs identités. De plusieurs genres, en fait, puisque l’on sait qu’Anohni, ex Anthony and the Johnsons, a franchi le pas au cours des derniers mois en changeant de pronom personnel (de « il » à « elle »), manifestant dans les faits ce qu’il était déjà largement manifesté jusqu’alors dans le discours.

anohni-hopelessness

5. Flume x Jonathan Zawada – Skin

Sur le visuel du second album du producteur australien Flume, une trainée de fleurs (des gentianes sans doute) s’élance vers des hauteurs inconnues, dont on ne voit pas la cime. Ces fleurs, ou du moins ces formes courbées comme des cors colorés (en violent-bleu, en rose), elles paraissent se changer en or au fur et à mesure que leur tige, tordue mais gracieuse, s’allonge jusqu’à ne plus en finir. Une métaphore de l’ascension fulgurante d’Harley Streten (aka Flume), qui, du jour au lendemain et à la faveur de la sortie d’une poignée de titres vite plébiscités (« Sleepless » surtout) s’était retrouvé sur les devants de la scène, de l’or (samplée) entre les mains ?

pochette de l'album skin de flume

D’autres analyses d’artworks ici, ici, et aussi ici.

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Bastien Stisi
Article écrit par :
Papa poule Néoprisme, plume en 140 ou en 14 000 caractères pour Radio Nova. Ex Brain Magazine, Toute La Culture, Boum!Bang!, Trax...

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