Le dernier clip de Toro y Moi est tombé hier dans l’après-midi, la tension était palpable dans l’équipe. Chaz Bundik sème la zizanie : on s’est tiré les cheveux, arraché les jupes pour savoir quelle rédactrice imposerait sa plume sur un tel trésor. Une poignée d’oursons en guimauve et une bouteille de rosé champagne plus tard, Victoria & Alice ont fait la paix et entament à 4 mains la critique de cette perle auditive et visuelle.
Au creux de l’hiver, Anything in return délivrait ses 13 titres, encensés chacun par les amateurs de pop & de chill-wave. Rose Quartz flatte vos tympans au moyen du style très identifiable de Toro Y Moi, ce gentleman. D’emblée, les premières touches de synthé tintent, éclatent et fusionnent jusqu’à la voix polissée de Chaz, dont la douceur légendaire s’envole au gré d’un riff de basse groovy et délicieux, à se taper le cul par terre. Ce qui transpire de sa musique, c’est sans conteste le paradoxe entre le rigoureux et savant mélange des genres et la sensibilité toute légère de ces collages vaporeux, images sonores qui – mises côte-à-côte – en font de la pure ouate auditive.
C’est ensuite une prouesse graphique, un bordel qui vrille, fébrile vers l’abstraction. Chaz, graphiste repenti, fait ici le choix téméraire de la peinture. Un espèce de stopmotion painting et appelle pour ce faire, Lauren Gregory, artiste peintre d’un primitivisme nouveau. La mise en scène façon clip psyché des années 70 (avec option champignon) va de paire avec l’idéologie kaléidoscopique présente ici. Ajoutez à cela des plans où s’animent des protagonistes modelés à la cire, et tu obtiens le délire hallucinatoire à son paroxysme. Antithèse du léché, on cultive ici la couche, la pâte, l’épaisseur, allant vers une forme quasi palpable ; pas trop mal pour du contenu Youtube.
Ce qu’on en retient, c’est que les ondes colorées et abstraites sont aux yeux ce que l’univers sonore et pop est aux oreilles, vous nous suivez ? Non ? Ça fait rien.
Victoria & Alice